Le sport, un pont entre société et Église

À l’occasion des Jeux de Paris cet été, l’Église catholique de France se mobilise à travers le programme Holy Games qui accompagne spirituellement le monde du sport et les événements sportifs. Cette initiative ecclésiale invite à réfléchir sur la place du sport et à penser celui-ci « comme un signe des temps1 » permettant à la société et à l’Église de se rencontrer sur le terrain du bien commun.

L’enfant trouve dans la pratique sportive le moyen de découvrir ses émotions et de développer sa motricité, son intellect. Ces pratiques sportives, enseignées souvent sous forme de jeu, sont un lieu de transmission de valeurs. Un exemple avec le judo, que l’on peut commencer dès l'âge de trois ans : le code moral du judo développé par Bernard Midan, en 1985, reprend la pensée de son fondateur Jigoro Kano (1860-1938) qui inventa cette nouvelle forme d’art martial afin que tout homme puisse s’accomplir. Les huit valeurs de ce code moral se déclinent ainsi : « Amitié, Courage, Respect, Contrôle de soi, Honneur, Politesse, Sincérité et Modestie ». Selon l’objectif de son fondateur, la pratique du judo doit aider la personne à trouver les moyens du succès les mieux adaptés, à s’améliorer et à contribuer à la société.
Cette vision n’est pas limitée au judo. L’adage Anima sana in corpore sano2 – dont la marque de chaussures ASICS a repris les initiales –, fait du sport une discipline éducative. Adopter ses valeurs positives contribue à entretenir la santé de l’esprit et du corps dans un développement intégral de la personne.

Sport et évangélisation

Le sport n’est pas qu’un exercice physique pour se détendre. C’est aussi un exercice spirituel, surtout lorsqu’il est pratiqué intensément avec « le désir de se dépasser, ou même de se transcender3 ». Dépassement et transcendance : deux mots qui, appliqués au sport, permettent d'affirmer qu’« il promeut, [et] se révèle être un terrain hautement favorable au déploiement des vertus chrétiennes4 ». L’analogie entre les valeurs du sportif et les vertus chrétiennes n’est possible que si l’on considère que ces valeurs et ces vertus conduisent l’homme vers le bien. 
Néanmoins, la foi chrétienne invite à aller plus loin dans la compréhension de ce bien, puisque la grâce vient sauver la nature humaine. Par son corps, l'homme peut « rendre gloire à Dieu » (1 Co 6,20) et vivre un certain esprit évangélique. La pratique sportive permet donc de témoigner du message de l’Évangile.

Entraînement et ascèse

« Tous les athlètes s’imposent une ascèse rigoureuse ; eux, c’est pour une couronne périssable, nous, pour une couronne impérissable », écrivait Paul (1 Co 9, 25). L'apôtre a utilisé l’image du sport pour rendre compte de l’engagement que réclame tout chemin de foi. Cette métaphore sportive témoigne que « le combat dur et exigeant pour la vie éternelle 5 » n’est possible que si l’on s’impose une discipline de sportif de haut niveau. 
Cette discipline que s’impose le sportif renvoie à la pratique de l’ascèse, mot dont l'origine grecque askêsis, signifie justement « exercice » ou « entraînement 6». L’athlète s’impose donc une discipline corporelle en vue d’un objectif : la victoire sportive. Le sage, lui, recherche la vérité au moyen d’exercices spirituels et se détache de tout ce qui y fait obstacle.
Pour l’athlète, le philosophe ou le chrétien, l’ascèse est un moyen d'atteindre son but. Selon Ignace de Loyola, le sens du terme « exercice » doit se comprendre en lien avec la volonté de Dieu ; il appelle « exercices spirituels » « toute manière de préparer et de disposer l’âme pour écarter de soi toutes les affections désordonnées et, après les avoir écartées, pour chercher et trouver la volonté divine dans la disposition de sa vie en vue du salut de son âme7 ».

Holy Games

Pour accompagner le monde du sport, l’Église catholique en France se mobilise avec le programme Holy Games qui veut rappeler que le sport invite au dépassement de soi, au service de la dignité de la personne et du bien commun. Une façon aussi d'allier le sport et l’Église, jeu et sainteté.

Holy Games s’inscrit dans un long compagnonnage entre l’Église catholique (qui compte de nombreux représentants dans les institutions sportives) et le monde du sport. Avec 20 millions de visiteurs attendus, 45 000 volontaires et 15 000 athlètes, les enjeux d’accueil et d'hospitalité pendant les Jeux de Paris sont considérables. Comme le rappelait le pape François, il s'agit là d'une occasion et d'un « instrument de rencontre, de formation, de mission et de sanctification 8».
La mobilisation de l’Église pendant ces Jeux s’articulera autour de deux points : d'une part, célébrer avec enthousiasme, à travers le sport, l’éminente dignité de la personne humaine et l’appel à la fraternité entre les peuples ; d'autre part, favoriser l’accès des plus vulnérables à ces Jeux, en particulier des personnes en situation de grande précarité, pour ne laisser personne au bord du chemin. Et ce, afin d’honorer la devise olympique : « Plus vite, plus haut, plus fort – ensemble ».

Jason Nioka

Jason Nioka est diacre en vue du sacerdoce pour le diocèse de Meaux. Ancien sportif de haut-niveau, ceinture noire de judo, il accompagne actuellement le pôle spirituel de Holy Games. Il est aussi le référent de l’Église catholique au sein du village des athlètes aux Jeux de Paris.

Notes
1- Gaudium et Spes n°4, Concile Vatican II.
2- Juvénal (Satire X) : « Un esprit sain dans un corps sain ».
3- Documents Épiscopat n°4-2021, Église et Sport : un terrain de rencontres, René Pichon (prêtre du diocèse de Chambéry et ancien sportif de haut-niveau).
4- Arnaud Bouthéon, Comme un athlète de Dieu, Manifeste sportif et chrétien, éd. Salvator, 2017.
5- Jean-Noël Aletti, Les métaphores sportives dans les lettres pauliniennes, « Transversalités », 2019/2 n° 149.
6- Ce mot inclut l’idée d’un travail en vue d’un art, d’un jeu ou d’une pratique avec une fin déterminée.
7- Ignace de Loyola, Exercices spirituels, n°1, éd. Desclée de Brouwer, 1992.
8- Discours devant les directeurs nationaux des Œuvres pontificales missionnaires, le 1er juin 2018.

Photo : Le sport, pratiqué intensément, devient une sorte d’exercice spirituel.
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